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Le réseau neuronal de Leela chess est capable de reconnaissance de structures de pions, de chunk : c’est-à-dire une vue partielle de l’échiquier comme le fianchetto en forme de pyramide, le roque et ses pions boucliers défendant le Roi ou l’enfermement d’une Tour par un Fou adverse défendant son pion menaçant la promotion bien avant que le pion s’avance jusqu’à la 7e rangée.
Le développeur ne peut pas localiser précisément dans quelle couche du réseau neuronal telle connaissance apprise réside. Dans les positions fermées de type française, Leela Chess zero surpasse l’horizon pourtant phénoménal de StockFish par des sacrifices positionnels à très long terme. Quand StockFish s’aperçoit de son erreur d’évaluation, il est déjà trop tard. Cela donne des pistes d’amélioration pour les développeurs de StockFish.
Perception des chunks
L’objectif pédagogique est de faire reconnaître aux apprenants les chunks que les GMI perçoivent : il s’agit d’une reconnaissance de forme mais aussi de la méthode pratique à appliquer à partir de ces structures visuelles.
« Un maître (au jeu d’échecs) ne cherche pas le bon coup, il le voit. »
De Groot ((A. D. De Groot, « Thought and Choice in Chess », Mouton Publishers, The Hague, 1965, traduction de son livre « Het denken van den schaker » (1946) ))
Il s’agit donc d’une meilleure maîtrise de la perception des zones importantes de l’échiquier et des meilleurs coups candidats plutôt que de puissance brute de calcul dans les variantes.
En 1946 (traduction anglaise en 1965), De Groot ((A. D. De Groot, « Thought and Choice in Chess », Mouton Publishers, The Hague, 1965, traduction de son livre « Het denken van den schaker » (1946) )) s’appuie sur l’étude de la verbalisation des GMI devant une position de jeu d’échecs avec la consigne de « penser à voix haute ». Il en conclut que le processus de réflexion dans le jeu d’échecs est typiquement non-verbal[ref] D’où la revue l’Informateur d’échecs sans commentaire verbalisé mais uniquement symbolique.[/ref] et abstrait[ref] Ouverture « dragon », « orang-outang », Cavalier « pieuvre », « python », se faire miniaturiser…, « peu clair »[/ref].
- Établir les éléments clefs de la position statique et ses relations sémantiques inter-pièces.
- L’étape dynamique liste les actions.
- L’étape « évaluative » analyse les conséquences des actions qui sont les plans.
La sélection fine des meilleurs coups candidats fait l’expertise. Les groupes de pièces sont perçus en « grands complexes » dont l’activation déclenche les méthodes de jeu stratégiques.
Exemples de chunks inspirés de Chase 1973
Les roques sont opposés. Fc1 est à développer. Te8 communique avec Ta8 auto-défendue.
Les roques sont organisés en fianchetto (triangle pyramidal) mais désertés par les Fous de cases noires en b2 et g7 d’où l’orange pour les Blancs dont le Roi a oublié de se réfugier en b1 : si Cf3-d5[ref]Null move heuristique : coup n°N… — {Les Noirs passent leur tour} N+1. Cf3-d5 ? Df6-a1#[/ref] {menace Df6 notée xDf6 et fourchette de Tours en c7} alors Df6-a1#. Le fianchetto noir est dans le rouge parce qu’en plus la pointe de la pyramide g6 n’a plus de pion bouclier. Si Df6xCc3 ? alors Dxh7+ avec l’idée Dxf7#.
Après h7-h6 repoussant Cg5, sacrifier e4-e5 += pour couper la grande diagonale à la Dame noire.
En 1973, Chase ((W. G. Chase, H. A. Simon , « Perception in chess », Cognitive Psychology, n°4, 1973, pp. 55-81)) et Simon approfondissent l’étude de De Groot et introduisent la notion de chunks perceptifs, un groupe jusqu’à cinq pièces qui s’attaquent ou se défendent : structure de pions, zone de roque, pièces auto-défendues. Par opposition, le chunk stratégique est une structure d’attaque ciblant le Roi adverse comme le sacrifice du Fou en h7 sur le O-O, règle de production valable après Rg8xFh7 si Cf3-g5+ et si la Dame peut monter une attaque de mat en h5 ou g4.
L’enfant ou le novice (rookie) pourrait gérer jusqu’à sept pièces en mémoire à court terme alors que le GMI manipulerait jusqu’à sept chunks. La différenciation entre le rookie et le GMI est que le GMI a développé un réseau de chunks[ref]Nombre de chunks d’un GMI : entre 50 000 (Simon ((H. A. Simon, K. J. Gilmartin, « A simulation of memory for chess positions », Cognitive Psychology, n°5, 1973, pp. 29-46)) et Gilmartin 1973) et 300 000 (Gobet ((F. Gobet, H. A. Simon, « Five seconds or sixty ? Presentation time in expert memory », Cognitive Science, n°24, 2000, pp. 651-682)) et Simon 2000).[/ref] en mémoire à long terme.
Réseau de templates dans la mémoire à long terme
En 1996, Gobet ((F. Gobet, H. A. Simon, « Templates in chess memory : A mechanism for recalling several boards », Cognitive Psychology, n°31, 1996, pp. 1-40)) et Simon introduisent le concept de modèle (template), un super-chunk pouvant contenir jusqu’à douze pièces ainsi que l’historique de la position.
L’idée de modèle est que le template peut être instancié en paramétrant ses variables offrant ainsi d’avantage de généricité et de souplesse sans le n° de coup[ref]Un lien entre modèles est implémenté grâce à la numérotation du modèle indépendamment du n° du coup.[/ref].
Une méthode associée au template donne les meilleurs coups et l’orientation stratégique du plan :
- exploser le centre par l’avance du pion bouclier f7-f5 ;
- coups candidats Cf6-h5 ou Cf6-e8. L’autre idée est Rh8 avec l’idée Cf6-g8.
En 2001, Reingold ((E. M. Reingold, N. Charness, M. Pomplun, D. M. Stampe, « Visual span in expert chess players : Evidence from eye movements », Psychological Science, n°12, 2001, pp. 48-55)) et al. étudient la fixation oculaire sur des mini-échiquiers de 3 cases sur 3 cases.
L’humain doit déterminer si le Roi est ou n’est pas en échec :
- le rookie fixe séquentiellement chaque pièce de façon courte. Il prend plus de temps pour trouver que le Roi n’est pas en échec ;
- le GMI fixe plus longuement le centre du chunk et entre les pièces c’est-à-dire les relations sémantiques. Son empan visuel est plus grand. Il traite l’information en parallèle. Trouver que le Roi est en échec ou n’est pas en échec prend le même temps.
En 2004, Ferrari ((André Didierjean, Vincent Ferrari, Evelyne Cauzinille-Marmèche, « L’expertise cognitive au jeu d’échecs : quoi de neuf depuis De Groot (1946) ? », L’année psychologique, n° 4 vol. 104, 2004, pp. 771-793)), Didierjean et Marmèche déterminent que les GMI encodent la position en cours et la configuration qui en découle par anticipation.
Bibliographie
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